• Mon style est souffrant et non pas l'instant.
    Le style dépasse et étouffe le coeur.
    Je voudrais une poésie où l'invisible beauté intérieure
    dépasserait la lisible beauté des vers et des rythmes.


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  • Mon périple ramuzien continue avec son troisième roman.
    Il se présente plutôt sous forme de nouvelle. De par sa chronologie respectée et aussi de par l'homogénéité de sa thématique. Dans Jean-Luc persécuté il n'est question que de Jean-Luc.
    Mais pour moi c'est surtout son premier récit ayant le Valais pour décor. Et pas n'importe lequel. Puisque Jean-Luc a sa maison à Lens, ma commune d'origine.
    Étonnamment ce ne sont point mes mémoires réelles qui servirent de décor mais celles des images sépia de l'époque. Il y avait trop de goudron et de crépi dans ma mémoire pour qu'elle ne fût point anachronique. Mais si mes images sont brunies et marquées d'empreintes multiples et inconnues ça reste néanmoins un voyage généalogique, une investigation darwinienne.
    Son récit est époustouflant d'efficacité. Et toujours cette impardonnable façon de nous conter une tragédie avec la légèreté qu'on emploierait à décrire l'avènement du printemps. Avec ces mots d'une simplicité si déroutante qu'ils nous prennent droit aux tripes. Ramuz sait s'adresser à ce petit enfant qui est en nous. C'est lui qu'il va caresser et mordre. Mais toujours avec la tendresse et le détachement des choses ordinaires. Puisque finalement en parlant d'un aspect de la vie, on ne fait non plus rien d'autre que de parler de la vie.


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  • Ernst Krenek pour deux raisons. La première parce que comme novembre son atonal travail a cette capacité de me balancer dans des états émotionnels contradictoires, tantôt dans le ping de l'angoisse, tantôt dans le pong de l'exaltation. La deuxième, et bien que cela n'ait rien à y voir, en référence à la Belle et la Bête de Cocteau. J'ai revu le film hier soir. Mais comme il s'agissait d'une version que j'avais téléchargée et que comme vous le savez on ne sait jamais vraiment ce que l'on télécharge le résultat n'était point accompagné de l'univers sonore de Georges Auric mais de celui de l'opéra composé en 1995 par Philip Glass. Musique d'une insistance un peu pesante à mon goût. Lors de sa création, le visuel était projeté avec ses sous-titres. Mon film en était exempt. Autant dire que s'il avait été chanté en Chinois je n'aurais pas fait la différence. Vous imaginez bien ma frustration, quelque peu remédiée aujourd'hui par quelques glanages de ci de là de par le web. Car que d'ambiguïté perdue sans les remarquables dialogues de Cocteau. Ambiguïté sans doute pas étrangère à l'étrangeté, au succès et à la pérennité du film. Principalement pour la figure de Belle. Évidemment l'interprétation est curieuse aujourd'hui, d'un mélo un peu comique. Mais l'équivoque des répliques ouvre des abîmes dans notre inconscient collectif de la femme-fille-mère-prude-dévergondée. Une Belle amoureuse de son bel Avenant mais qui sacrifie son amour au nom du père. Aurait-elle pu sans ce même esprit de sacrifice aimer la Bête au delà de sa laideur ? Ainsi son amour était-il véritablement désintéressé ? Même ses soeurs cupides et égoïstes auraient pu pour d'autres raisons éprouver de l'amour pour cette Bête-là... Bizarrerie qui tendrait davantage à démontrer que dans tout amour, c'est avant tout celui de soi qu'on cherche à travers l'autre.
    A part ça, l'esthétique est splendide. Je repense à cette course de Josette Day (la Belle) à travers les couloirs et les escaliers du château. Ils sont rendus dans un ralenti qui par les mouvements de ses étoffes nous donne un sentiment d'envol... poétique.

    Et là je suis bien content de voir que ce post est bientôt suffisamment long pour pouvoir évincer la dernière partie de mon titre. A boire. De Marion Vernoux. Avec Edouard Baer et Emmanuelle Béart. On m'avait conseillé ce film il y a deux ans quand je devais interpréter un alcoolique. Heureusement que je ne l'ai pas regardé avant qu'il ne soit plus que trop tard. C'est une comédie et ça justifie peut-être cet effet caricature. Pas à mes yeux. Ce film ne raconte plus rien. Il ne parvient même pas à faire rire. Ce qui est un peu dommage pour une comédie. Je pourrais m'en désoler quelques lignes de plus mais heureusement Cocteau a atteint mon quota. :-)


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  • Encore un ventre à explorer, demain, un ventre chaud. Couloirs sans issue qui montent et qui descendent, labyrinthe cher aux poètes de la nuit carcérale et à leurs amours inavouées, inavouables, qu'ils tiennent en laisse (fantômes) jusqu'à l'heure du jugement dernier. Dans les yeux de mon amour, dans ces yeux-là, dans ces yeux seuls (pardonnez-moi si j'insiste) il y a des chiens tenus en laisse par des fantômes et des arbres immenses qui tapissent le ciel d'avant les temps vécus, les temps marins, les temps rauques jouxtant d'autres amours en forme de cour intérieure où la lumière ne pénètre que par saccades quand tout un fourmillement de visages et de trompes suffit à peine à donner l'illusion de la Vie et de la blancheur éternelle. J'explorerai ce ventre jusqu'aux boyaux les plus reculés dont aucune conscience humaine n'a jamais soupçonné l'existence : galeries en spirales qui se resserrent jusqu'à l'étreinte ulcérée qui me fera hurler de douleur ! Je poursuivrai néanmoins mon exploration. Seul ! Où es-tu, toi que j'ai libérée de cette tension qui te faisait t'agripper à des murailles plus lisses que du verre contre lesquelles tu usais tes griffes jusqu'au sang ? Aurais-tu à la fin traversé ces murs, cette part de ténèbres qui t'était due à toi aussi, et que nous n'avons pas su entretenir ?

    Vital Bender


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  • Pourtant il est triste.

    Son dynamisme coutumier semble effacé et sa pesante indifférence observe ce curieux cortège de réminiscences comme si elles n'étaient point siennes.

    Le mouvement semble s'abstenir. Seule la rivière devant lui insiste vers sa finalité. Il a réussi. Oui mais à quoi bon ? La vanité de ses trépignements éteints le heurte en plein visage comme si tout ce pourquoi il s'était battu, ce qu'il avait pu obtenir n'avaient plus le moindre sens. A nouveau enfanté sur ce pont de bois ; il est à refaire, comme au premier jour.

    Alors le monde au complet semble s'évanouir, enfoui par le roulement des flots quand un vent froid précédé d'un claquement sec de battement d'ailes brûle soudain ses tempes.
    Extirpé de son aphasie, il découvre derrière lui, accroché à une poutre du ponton comme un vulgaire sac à ordures ce qui paraît être une gigantesque chauve-souris. Mais à peine a-t-il le temps de réaliser l'incongruité de cette visite qu'un éclair lumineux métamorphose cet ôte en une sorte de vampire de cinéma. Les membranes des ailes forment maintenant une splendide cape de velours noir et des dents aiguisées pointent hors de ses lèvres pourpres qui constrastent avec un teint désespérément blafard. ./.


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