• Pour l'instant la tente tient l'eau mais si ça continue avec cette violence j'ai des doutes. Il est 09h15 et le troisième orage éclate. Ma virée me paraît compromise. Suis condamné à l'attente, inquiet pour le matériel. Ça passerait du supportable à la misère totale. Quelle impuissance !
    Le voilà exactement sur ma tête. Ouaouh !
    10h20. Plus d'une heure de déluge et ça a tenu. Seulement c'est plutôt morose sous tente. On y est bien que couché. Et dehors tout est trempe et il fait trop froid pour tourner en rond...
    Advienne que pourra. Je me lance à l'assaut du Mt-Bonvin.
    Au bout de trois heures, un nouvel orage se précise à l'horizon. Je rebrousse chemin direction cabane des Violettes. L'averse se déclenche à l'instant même où je franchis le chambranle de la porte. Timing impeccable.
    Je m'enquiers de la météo. Des orages sont prévus pour toute la nuit suivante avec une baisse de température et du coup une limite des chutes de neige à 1800 mètres. Je décide de dormir sur place. C'est aussi l'occasion d'un vrai repas. L'ambiance s'annonce bien différente, une famille vient de débarquer avec trois enfants en bas âge...
    Les enfants n'ont pas bronché, par contre l'ennemi surprit ma vigilance à l'endroit même qui nourrit la réputation des nuits en cabane : les ronflements. Il y avait là des spécimens de la brigade d'intervention spécialement aguerris. Cela ajouté à mes insomnies chroniques depuis que je suis en montagne, la nuit me parut longue. Très longue...


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  • De retour j'ai pu expérimenter une nouvelle fois la douche des glaciers et je comprends qu'avec une eau si froide une seule lettre sépare ablution d'ablation. Mais la pratique était indispensable car je venais d'offrir à la nature mon premier caca qui d'un beau brun vira instantanément au noir tant le festin comptait d'invités.

    A l'instant où j'écris, je suis fasciné par le labeur de bergers éloignés qui tentent désespérément de rameuter leurs bêtes. Mission impossible. Ils les conduisent d'un côté, elle filent de l'autre. A peine rassemblées elles se scindent à nouveau. Un vrai bal clownesque que je savoure des premières loges de mon promontoire. Ça y est ils abandonnent.

    Toujours de grandes difficultés à trouver le sommeil. Je ne m'épargne pourtant pas en journée. Et même là d'ailleurs, aucun coup de barre. Je pète la forme.
    Le ciel aussi a pété sa rage. Puissantes rafales de vent toute la nuit pour exploser en orage peu avant l'aube.


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  • Je viens de comprendre que si on marche tôt en montagne c'est surtout parce qu'il n'y a rien d'autre à faire. Il fait trop froid.
    C'est presqu'à la course que j'ai entamé ma course et comme toute la montée est dans l'ombre j'ai même eu peine à transpirer. Je voulais contourner le Rothorn et le prendre par l'arête nord depuis le glacier du Lämmer. Par endroits elle ne fait guère plus de cinq mètres de haut. Je les pensais aisément franchissables.
    C'était sans tenir compte de la friabilité de la roche de ce côté-ci. La montagne tombe en miettes. Les quatre mille de la rive gauche du Rhône offrent une fierté stable. Les reliefs de la rive droite me font penser à la peau d'un vieil éléphant. Ce qui leur confère une beauté très étrange, presque lunaire ; enfin selon l'idée que je me fais de la lune.
    Donc c'est bien mal pris que se trouva pris celui qui croyait prendre. Tout s'effritait. Et sous la roche, le glacier formait un joli toboggan d'une centaine de mètres. Il aurait amorti ma chute et j'aurais eu de la peine à en mourir mais je me serais sans aucun doute trouvé bien amoché. Et sans téléphone car je l'avais laissé sous tente pour être certain de le retrouver au moment du devoir filial (c'est pas vrai, je l'avais sur moi mais trouvais l'anecdote amusante).
    L'avantage avec une roche friable c'est qu'on peut y tailler des marches. Ca prend du temps mais je peine à renoncer.
    Le point de vue en valut la peine. Le plateau du Rothorn ouvre sur tout le glacier de la Plaine morte. Et comme par rapport aux classiques réputés, cette partie est très peu fréquentée j'y ai goûté en solitaire.


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  • Pour rassurer ma mère qui s'angoisse dès qu'il s'agit de montagne, j'avais promis de lui composer un sms au terme de chaque journée. Au moment de m'en acquitter, je ne parviens pas à mettre ma main sur mon téléphone. Et je retourne mon sac et mes souvenirs en vain. Le plus probable est que je l'aie oublié à la cabane. Impossible d'y retourner. La nuit tombe et j'ai déjà cinq heures de marche dans les pattes. Je l'imagine désemparé ameuter pompiers et Rega.
    Voilà le geste manqué par excellence. Pour moi, même si c'était de bon coeur, c'était céder par complaisance à un caprice que d'accepter de jouer ce jeu. Si je me blesse je peux appeler, si je me tue rien ne presse.
    De plus, on s'habitue d'abord à imaginer le pire avec ce genre de procédé. L'état permanent est l'alarme. Elle ne s'apaise qu'à la réception du message. Alors que dans le cas inverse l'état permanent est la confiance, qui ne prend fin qu'au moment d'agir. Sans compter que bien plus d'incidents bénins peuvent interrompre cette régularité que l'accident tant redouté. La preuve par les faits.
    Mais cette fois-ci la Rega ne fut pas sollicitée à blanc car je l'ai finalement retrouvé dans mon texte d'Oedipe.
    La nuit fut bien plus agréable. L'addition matelas - couverture fit bien l'affaire et pour la première fois, en me couchant en même temps que le soleil, je n'ai pas eu froid. Par contre je peine à m'endormir et je me réveille très tôt. En pleine forme.


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  • Au matin le temps est couvert et je tourne en rond, ne sachant que décider.
    J'avais d'abord l'intention d'atteindre les 2997m du Trubelstock avant de regagner l'emplacement de ma tente... Et puis merde, on est en juillet, qu'importe la pluie.
    Finalement, si quelques bancs de brouillard raffraichirent la montée, il ne plut que très peu et l'excursion suivit mes prévisions sans autre encombre. De retour au camp, tout est à sa place même si la toile de sol ne paraît pas si imperméable que le vantait le prospectus. Heureusement, si le matelas se dégonfle, il aura au moins la vertu d'isoler la couverture que j'ai ramenée de la cabane. La montagne est décidément une affaire de matériel. D'ailleurs, enfin équipé en feu grâce à mon incartade, je découvre dans un rire que mon réchaud était pourvu d'un allume-feu incorporé. Mes allumettes me seront de rien. ./.


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