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Safari dans l'avion pour Kin (2)
Notre trio fellinien, c'est confirmé, est donc constitué d'une brave famille de polonais tombés du ciel ; ils seront mes voisins de voyage. Ils ont dû gagner au loto, c'est pas possible, et s'offrir un safari ainsi que des (oui des) téléphones portables derniers cris ainsi que plusieurs (oui plusieurs) appareils photos. Elles, les femmes léopards, ont commencé par essayer de manipuler un appareil reflex très sophistiqué pour se prendre en photo dans l'avion. Et l'inévitable est arrivé : elles m'ont demandé de les prendre en photo et donc (et surtout) de mettre en marche l'appareil. J'ai fièrement réussi à l'allumer et à atteindre le menu sans pouvoir pousser plus loin : c'était écrit en russe. Le papa a trouvé une parade imparable : il a sorti un petit appareil numérique très accessible et facile d'emploi. Et le safari photo a pu commencer à plus de dix mille mètres d'altitude dans un airbus de la compagnie Bruxelles Airlines.
Un excellent repas nous a été servi avec un poulet au curry très convaincant. Les végétariens ont eu moins de chance que nous car pendant que nous mangions, les télés au-dessus de nos têtes nous déversaient d'interminables scènes de chasse où les léopards (sic !) n'en finissaient pas de dévorer différents types de gazelles encore vivantes (une fois le papa léopard, puis une fois le papa léopard avec sa femelle et sa fille aînée, puis une autre fois avec les enfants léopards. Mais à chaque fois une gazelle différente bien sûr...). Enfin, on est arrivés au bout du repas, heureux d'en avoir fini.
Sur ma droite, à côté de Corinne, une des rares femmes congolaises dans l'avion encore en boubou. Ses mains dépassent d'une grosse veste en laine et ses pieds nus de la vieille couverture d'une compagnie aérienne probablement disparue. Elle compulse le "dictionnaire des personnages de la Bible", ouvrage qui lui sera très utile quand nous traverserons l'orage tropical en descendant sur Douala. Pendant les franches secousses, mes Polonaises poussent des grands cris en s'agrippant l'une à l'autre pour ne pas tomber plus bas. La maman tentera quelques prières en polonais, sans grand succès à vrai dire.
Corinne et moi étions très bien entourés dans cet avion catholique. Nous ne risquions plus rien.Et c'est ainsi que nous sommes arrivés sains et saufs à Kinshasa. Je vous passe l'épisode du douanier qui s'appelait aussi Thierry et qui nous a fait poireauter très très longtemps pendant que tous les autres voyageurs étaient déjà rentrés chez eux : il n'arrivait pas à déchiffrer les passeports de trois citoyens d'un pays du golfe persique. C'était écrit en arabe ! (véridique !).
Et nous voilà accueillis par un des membres fondateurs du Théâtre des Intrigants qui a certains passes droits car il est député de l'assemblée nationale. C'est Valentin Mitendo surnommé par ses proches et amis : "l'Honorable". Nous passons grâce à lui avec grande facilité les derniers contrôles douaniers. Nous voilà dehors, avec une flopée d'Intrigants à nous embrasser. Dont Edo, l'actuel directeur du théâtre et Bavon que nous connaissons bien pour avoir travaillé avec lui sur "Kardérah".
Et nous plongeons dans le noir de la ville.
Thierry Crozat
A suivre...
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Commentaires
J'adore