• La route : John Hillcoat

    Aventure eschathologique d'un homme et son fils en route vers la mer. Un but. Une creuse raison de continuer dans un monde en ruine où plus rien ne demeure que les instincts primaires. La survie. Pour la plupart à tout prix. Toute forme de vie semble avoir disparu hormis celle de quelques survivants s'étant réunis en clans cannibales pour retarder un inéluctable pourtant de loin préférable à cette existence réduite aux souvenirs.
    L'intérêt du film réside en cela. Ce qui était et qui n'est plus. Il y a bien ces rencontres insanes qui ponctuent une intrigue nivelée à l'image de ce qu'est devenu le monde. Vide et plat. Sinon rien. Même pas l'espoir que les choses puissent reprendre dans un hypothétique avenir. La route est une vaste allégorie de la perte. La perte de la civilisation, des valeurs, d'une morale, des croyances, de la paix, de ceux qu'on a aimés. Pour Viggo Mortensen qui crève l'écran il s'agit de la mère de son fils. La femme qu'il a aimée. Qu'il a perdue. Cette femme pour qui le courage était de disparaître alors que celui de la morale du héros était de continuer, au-delà de la peur et la souffrance, jusqu'à ce que la nature nous désigne.
    Ainsi, cette douleur l'habite jusqu'à l'agacement du spectateur comme une émotion qui l'assurerait d'encore appartenir à un vestige d'humanité. La douleur encore préférable à l'étouffement des émotions. La douleur encore préférable à ce monde-là.

    Combien sommes-nous dans le nôtre à préférer celle-ci aux ouvertures que nous offrent encore la vie ? A choisir une souffrance qui nous paraît plus conforme à la vision que nous gardons de nous-mêmes plutôt que de nous diriger vers des joies qui nous transfigureraient ?

    Malheureusement donc le film traîne en longueur, évite difficilement les poncifs relatifs au genre, les images n'ayant pas la capacité de creuser des abîmes comme j'imagine que le fait le roman de Cormac Mc Carthy dont il s'inspire. Il aurait pu être traité en court-métrage et peut-être gagné en intensité. En tout cas pour moi il était trop long pour ce qu'il avait à dire. Ou trop linéaire.


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