• Frédéric Beigbeder : Un roman français

    Faut-il céder aux sirènes médiatiques qui partout hurlent les mérites d'un publiciste reconverti ? N'est-ce pas par les autoroutes décriées qu'il parvient sur notre table de nuit ? Et ne devrait-on pas pour valider sa dénonciation du système le bouder superbement ?
    Sans aucun doute. Mais comme personne ne m'avait lié au mât de l'indifférence je me suis échoué sur les récifs du prêt-à-porter de la littérature.
    J'avais vu "99.-fr" mais à part ses chroniques que j'aime lire dans "Lire" je n'avais rien lu du personnage. Cependant il s'est suffisamment illustré pour qu'on soit tenté de le cataloguer quelque peu. Le piège à double tranchant des figures médiatisées. On parle de nous mais notre image nous échappe. On parle de nous comme d'un étranger et pour nous reconnaître il faut correspondre à cette image. Surtout si nous dépendons de celle-ci. Et Beigbeder s'identifie-t-il suffisamment à son image pour qu'il nous faille nous aussi l'y identifier ?  A cette image de beauf moderne au costard de marque impeccablement taillé mais cool, à cette tenue nonchalante mais calculée, à cette barbe naissante négligée mais étudiée, à cet air à la fois supérieur et humble, hautain et engageant, méfiant et implorant, avide et craintif, bref... un peu perdu entre ce qu'il aimerait être, ce qu'il craint être, ce qu'il se défend d'être et ce qu'il ne sait pas qu'il est ? Peut-être. Mais point n'est ici le propos de débattre de l'opposition entre le Beigbeder privé et public. A lui de surmonter la schizophrénie dont il est peut-être aujourd'hui la victime.
    Malheureusement quand on pratique l'autofiction, on surmonte son privé en public. Et forcément il m'a été difficile d'éluder l'auteur. Cela a-t-il entaché ma lecture ? Sans doute à un niveau.
    Beigbeder s'est fait arrêter sur la voie publique à cause d'un acte qu'il aurait dû commettre en privé. A savoir se sniffer une ligne de coke sur le capot d'une bagnole de luxe. - Mais sans doute que la bagnole était trop difficile à rentrer dans son salon. - Comme c'est un personnage public, on a voulu en faire un exemple et on l'a gardé plus que de raison. Beigbeder part de ce fait pour revisiter son enfance dont il veut s'expliquer l'absence de souvenir. C'est l'aspect le plus splendide du roman. Les énumérations de marques à la Oskar Wilde quand il se perd dans ses gemmes (Dorian Gray) m'ont un peu excédé, sinon je l'ai trouvé sensible, honnête et très juste. De plus j'ai apprécié ce voyage dans ma propre adolescence.
    Quant au prétexte - le compte rendu de sa préventive - j'ai eu ma foi un peu de peine et n'ai pu éviter le parallèle avec une Paris Hilton en larmes suite à son incarcération pour avoir fait pipi dans un caniveau. Il voudrait trancher à la zorro, mais il faudrait qu'il évolue masqué parce que là, il parvient juste à frapper dans le vide. Et si maladroitement que ça ne m'étonnerait pas que sa lame finisse sa course dans un quelconque endroit de sa propre chair.


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