• Eric Masserey : Une si belle ignorance (généalogies) et autres histoires

    La première fois que j'ai vu Eric Masserey c'était lors d'une séance de dédicaces dans une librairie sédunoise. Je m'y étais rendu pour retrouver une amie d'école normale que j'avais perdue de vue jusque là et qui signait sa première publication. Mon amie avait signalé avec fracas sa tournée des libraires et était encerclée d'un amas enthousiaste et diffluent. Ce qui de toute évidence n'était pas le cas d'Eric Masserey qui semblait se prêter à l'exercice d'une grâce plutôt empruntée, comme un dodo en Alaska, échoué en un lieu impropre et presque hostile puisque d'une effervescence qui ne lui était pas destinée. Si bien que je n'ai compris que bien plus tard que lui aussi présentait des ouvrages. Visiblement, ce soir-là, Eric eût préféré être ailleurs.
    La deuxième fois que j'ai vu Eric Masserey c'était le lendemain même à la sortie de l'unique représentation sierroise d'Oedipe Roi. Je l'ai immédiatement reconnu, un peu gêné toutefois, car je n'avais pas osé l'approcher la veille tant sa place lui paraissait inconfortable et tant je ne voulais pas risquer une dépense supplémentaire. Nous avons échangé quelques mots et suite à l'impression renouvelée d'humilité et de mélancolie qui se dégagea du bref partage, je me suis promis de lire son livre dont j'avais déjà lu le plus grand bien chez Alain Bagnoud.

    Ce livre est une friandise. Un dessert. Mais un dessert d'occasions. Une madeleine qu'on n'extrairait de son écrin qu'après s'être ordonné l'intérieur, d'y avoir réveillé sa présence et d'avoir pris trois longues respirations.
    Comme son nom l'indique, Eric Masserey nous embarque dans le passé de sa famille et dans le sien, lointain ou rapproché. Les mots sont teintés de mélancolie et on les sent comme issus davantage d'une méditation que d'une volonté, de ces moments échappés au temps où on s'arrête pour écouter ses vagues intimes. Ainsi Eric Masserey m'apparaît comme ces ballons atmosphériques, lâchés vers ces strates inhumaines mais encore scellés à la terre avec en fantôme omniprésent cette pointe de douleur causée par la tension contradictoire. Et cette fêlure nous touche, comme écho à celle que nous portons tous. Ou par compassion et reconnaissance face à une réelle sincérité.


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