• Tenté en vain de remonter le temps jusqu'à l'utérus originel
    toi mon frère aux aguets dans les sous-bois sidéens
    toi soeur du genre humain auréolée de feux de Saint-Elme.
    Marché dans les rues désertes sans te reconnaître
    entendu tinter tes larmes dans les yeux globuleux des vitrines
    prononcé (toi !) du bout des lèvres le nom de quelqu'un qui ne m'était plus tout à fait étranger.
    La brume se déchire. Un corps sans tronc - deux jambes surmontées d'un embryon de visage - remonte ces mêmes ruelles en rasant les murs.
    Un frisson d'asthme court entre les feuilles d'hibiscus et de vigne vierge.
    Il fait à peine jour et les écureuils se faufilent entre les pierres disjointes des habitations qui n'en finissent pas d'apparaître et de se dissoudre dans ce brouillard qui semble provenir de l'intérieur même de ces vieilles bâtisses (et de ces corps en extase.)
    Un paralytique les yeux révulsés psalmodie sous un porche qui semble flotter.
    Ici l'on imagine sans peine la capitulation des âmes et leur déportation sans précédent vers les deltas d'apocalypse.
    Mais nul être ne remontera jusqu'à la source qui fut ce ventre et qui n'est plus qu'une énorme fente blême
    une ruelle qu'on emprunte par hasard au lever du jour
    et qui pour une heure nous tient lieu de nid chaud. 

    Vital Bender 


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  • Un ciel doué de raison
    à l'intérieur de nos ventres qui chantaient comme des gargouilles.
    Il pleut dans mon estomac et mon foie foule le feu des mers du sud.
    Chant de nos corps bateaux corsaires dérivant sur des dunes de crêpe et de mousse à raser.
    L'haleine des morts gonfle nos voiles.
    Ce peu de souffle qu'il nous reste - à demain ! - mais nous sommes encore en rade.
    Voici l'heure des croissants chauds et des champignons apprêtés pour un festin sans pareil
    et des poissons frits dans de la graisse de femme - vierge de préférence - mais nous n'avons pas encore levé l'ancre !
    Un ciel rouge comme tes glaires mon amour - ou comme du blanc d'oeuf - et transpirant dans la toute première stimulation de ton cri quand tu rebondissais comme une balle folle de ton lit de mort au plafond (repeint pour la circonstance.)
    Oh ce ciel insolent qui dansait
    cette toile trouée d'une simple secousse nerveuse !
    Et la révélation de tout un chaos d'os stagnants et de mandibules dressées !!! 

    Vital Bender 


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  • Les temps sont proches où les pierres, toutes les pierres de toutes les saveurs réintégreront nos bouches comme des morceaux de pain noir. Toutes les pendules se détacheront des murs. Je vois un nez à la devanture du ciel (ou du caniveau), un nez perforé d'aiguilles à tricoter des mots sans affectation, des mots... qui s'attardent et devraient voler en éclats au bout de ces rues en trompe l'oeil, je sens des pierres - ce sont encore des mots ! - se bousculer au fond de ma poitrine et je crache, je crache... un caillot d'oiseaux multicolores... puis tout un flot de pendules qui se mettent à sonner l'heure du jugement dernier, je dois avoir l'air con avec mes oreilles en bois d'acajou et mes viscères entortillés autour de mon cou sans fin à l'intérieur duquel monte et descend d'un bout du jour à l'autre un ascenseur vide et tout déglingué. Silence puis : cliquetis d'aiguilles d'horloges tricotant l'absence de toute bien-aimée à travers un nuage de plumes roses comme les mains du nourrisson que j'étais encore tout à l'heure.
    Je vois une lame se lever dans la nuit, un éclair traverser mon corps, j'assiste à cette scène, il n'y a pas de purgatoire, un tonneau roule sur la pente, une ombre se glisse entre les feuilles, peut-être atteindrons-nous cette côte (si elle existe). J'entends le chant des ventre vides et des terreurs nouvelles, tempo morne qui s'agrippe à des saillies de jour, et je vois, oh je vois... des mains de femmes si belles que l'eau jaillit du sol entre les pierres.

    Vital Bender 


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  • Tendre complice ce soir tes seins usés perchés sur leur nuage glissant lentement sous ce plafonnier sans retour...
    Le pôle de cachemire aux yeux clairs et tes seins - toujours eux - sous la pendule qui sonne toujours la même heure.
    L'amour comme une carcasse de baleineau où les mouches et les vers rayonnent dans ce soleil de fin de jour arctique.
    Oh oui ! nous danserons encore sous cette pendule accrochée à la proue de notre coquille de noix poisson bateau-mouche...
    Nous nous trémousserons comme des damnés tandis que d'autres s'aiment ou croient s'aimer du plus profond de leur coma éternel.
    Nous nous endormirons l'un dans l'autre :
    il n'y aura plus rien plus rien qu'un chant plus rien
    que la mélopée douce de nos corps
    que la désagrégation de nos corps
    que la braise de nos corps
    et toi ! toi ! crachant des perles d'ibis sur le parquet !
    Complice de toutes ces heures qu'aucune pendule au monde n'aura jamais sonnées
    complice
    de cette graine que j'ai plantée peut-être une nuit de hasard et qui germe déjà dans le terreau d'une autre femme.

    Vital Bender 


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  • Regarder le ciel dans les yeux des morts dans les yeux du ciel qui s'achève en angles de coeur maman regarder
    cette clarté des corps en ébullition
    dans laquelle nous nous dissoudrons à notre tour
    maman ! il le faut bien...
    Regarder dans les yeux les morts aux yeux piqués de reflets d'opale ou d'émeraude
    à travers les roulements de tambour des morts dansant dans les buées roses du premier matin
    des yeux roulant au fond de cavernes orbitales des yeux - maman ! - fuyant sous les réseaux de hautes tensions de nerfs guitare et coulant mélasse sur tout le pain des jours à partager oh fuite fuite
    des yeux vers l'horizon toujours au loin recule - et cap vers l'intérieur des terres vers l'intérieur
    des mers ! ces yeux ! tandis qu'au loin : rondeurs de seins de mortes en amour etc...

    Vital Bender 


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