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C'est un jour comme un autre
C'est un jour comme un autre.
La mère de ces petits enfants (elle a perdu la raison) du matin au soir lance des morceaux de pain à des oiseaux imaginaires.
Un homme sur un banc ne la quitte pas des yeux.
Fait semblant de lire le journal de la veille entre deux averses.
Porte un chapeau de paille rongé par les chiens errants et les intempéries.
La femme tour à tour chantonne pour elle-même entre ses dents pointues et converse à sa façon avec les volatiles.
L'homme sort un harmonica de sa poche.
Encore une de ces vies à oublier avant même de l'avoir vécue !
Encore un de ces mouchoirs crasseux dans lequel on mord par dépit ou par habitude
ou par passion.
Depuis plus d'une heure la jeune femme demeure prostrée dans son laps de temps.
L'allée est vaste comme un ciel dont on a perdu conscience.
Il ne faut plus me parler d'oiseaux (d'oiseaux d'oiseaux d'oiseaux !...) pense-t-elle en grattant le sol de ses doigts trop fins.
Un enfant détale aussitôt.
Un autre essuie une larme en regardant sa mère sucer un petit caillou blanc.
L'homme jouit du spectacle.
Les jours ressemblent aux jours ressemblent aux jours ressemblent... pense-t-il en enveloppant son harmonica dans un mouchoir sale.
La pluie redouble:
Le deuxième enfant se met à courir.
Court court vers sa mère.
Vers la cristallisation du vide.
L'homme soulève son chapeau.
Un oiseau s'en échappe.
Puis un autre.
Un autre encore...
L'enfant le regarde ébahi.
A demain dit l'homme.
Et il s'en va.
La main dans son journal.
Le journal sur le banc.
Le banc dans son chapeau.Vital Bender
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Commentaires
C'est gentil
mais c'est pas le mien. C'est le sien. A Vital. Si ça t'intéresse je raconte tout ça à la page qui inaugure le thème "Demain avant de naître". Qui est le titre de son dernier recueil de poèmes.3RobertaVendredi 9 Octobre 2009 à 09:48J'aime
beaucoup vos photos et votre regard sur les choses qui vous entourent (Oedipe Horn + Demain avant de naître). Enfin pas toutes, mais un grand nombre. Quant à Vital, j'n'l'ai pas encore bcp lu, mais il a tout d'un grand poète pas très heureux, semble-t-il. Il est mort de quoi, suicide?...4VéroVendredi 9 Octobre 2009 à 18:18Sète?
C'est à Sète (si j'ai bien suivi...) ces photos, ces lessives et ces balcons? Bon, une raisinée avec raclette m'attend. C'est une première pr moi (la raisinée, pas la raclette, donc...).5VéroVendredi 9 Octobre 2009 à 18:19@roberta
Disons qu'il avait manqué un train qui ne l'a pas loupé lui. (J'espère que ce condamnable humour le fera sourire un coup de là-haut.)8VéroMardi 13 Octobre 2009 à 14:49...
J'en prends note (très jolie ville). Redoutable dites vous?... Vous étiez toute une équipe de potes à les accueillir?Ouais
Et c'était ma seule semaine de vacances. Aussitôt après l'isolement Oedipe Horn. J'étais chargé à bloc.10VéroJeudi 22 Octobre 2009 à 01:02Ah voilà...
Et ça donne quoi quand t'es chargé à bloc?... :o) Je pense que certains n'apprécieraient pas un tel contraste après une semaine Oedipe Horn.11RobertaJeudi 22 Octobre 2009 à 01:05Raisinée
Vous savez ce que c'est une raisinée, vous? Il semblerait que seuls les vaudois connaissent cela...
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j'aime beaucoup votre style