• En me promenant de ci de là de blog en blog, me béatant d'admiration pour les ingénieuses trouvailles esthétiques censées donner du "je" à son blog, me suis décidé de ne rien en faire. De ne pas céder à la pression ambiante qui consiste à nous illusionner quant à la liberté que nous accordent les sélections et modifications de mise en page à disposition. Ce n'est pas que les possibilités proposées sont insuffisantes à ma débordante imagination mais plutôt que cette large palette m'écœurerait et surtout ne me définirait pas. D'une part quoi qu'on fasse on reste toujours soumis au carcan qui nous accueille. On peut bien faire preuve de la plus légitime (sans doute) envie d'être inimitable, il est impossible de s'émanciper du cadre qui nous héberge, aussi large soit-il. D'autre part ce serait céder au diktat des technocrates (dont j'admire le travail soit dit en passant) mais qui nous détermine (le diktat donc) bien plus que nous pensons et ne pourrons jamais le déterminer. Nous pouvons nous leurrer à croire qu'en maîtrisant cet outil nous gagnons en indépendance mais en fait nous nous configurons à un univers qui nous est imposé. Déjà je blogue, c'est bien assez. Peut-être argumenterez-vous que l'adaptation est un facteur essentiel de l'intelligence. Je conçois que cela puisse être vrai dans la mesure où elle est nécessaire à assurer la survie de l'espèce. Mais comme sa motivation est naturelle et vitale il faudrait prendre garde à ce qu'elle ne devienne pas habituelle. Nous y perdrions notre identité. Et combien sommes-nous à nous égarer dans le politiquement correct ? La dictature du nombre ? Donc je dis non ! Mon blog ne subira pas la moindre modification de couleur ni de forme. Ce serait me fourvoyer quant à la vertu première que je lui destinais : écrire. Et ne venez pas me dire que je cède à ma paresse. Même si c'est vrai. Car je vous répondrai qu'une absence de forme exige un surcroit de fond. Et j'ai toujours eu peur de manquer d'air.

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  • Y a des fois où on se sent tout vide. Où qu'on n'est pas heureux ni malheureux comme qui dirait Arno. Où qu'on est là parce que ma foi on est vivant de corps et que par la force de l'être au monde il faut bien qu'on soit quelque part et qu'après tout c'est pas pire qu'ailleurs. C'est même mieux qu'on se dit. Puisque cet ailleurs on n'a même pas la force de s'l'imaginer. Puisque dans le ventre à l'intérieur on a faim que de ce qu'on ne peut avaler. Qu'on a putain de la chance caca crotte bique chier merde. Qu'on se dit.

    Y a des fois où on se demande où que c'est passé tout ce qui fait qu'on est là. Et on regarde ses mains avec toutes ces lignes qui courent dans tous les sens et qui se croisent tout plein tout le temps. Et ça fait sourire une main avec ses doigts au bout. Ca bouge quand on veut comme on veut. Et on se redit que c'est trop dingue d'avoir une veine pareille. Tudieu. Des doigts des mains des lignes une veine. C'est trop de la balle. Qu'on se dit.

    Y a des fois où on se dit qu'on a plein de demains et que c'est trop le délire d'avoir tant de demains. D'en avoir plein les poches à sortir comme ça dans un sourire une grimace un désir. De dire youhou la vie regarde-moi tous ces demains à ne plus savoir qu'enfer et de partir sur la route des happy end prêt à exploser de toutes ces larmes qui nous noient de l'intérieur. Avec un soleil couchant. Au bout. Et c'est beau. Qu'on se dit.

    Et pourtant on reste. Debout.


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  • Dernièrement une amie que je vois peu mais que j'estime beaucoup a été surprise que je fasse une différence entre l'amour propre et l'estime de soi :

    Ouais énorme différence. - J'ai répondu. -
    Pour moi l'amour propre freine et l'estime de soi stimule. En agissant par amour propre on croit donner mais on prend (ce qui a dû être mon système de fonctionnement la majeure partie du temps, et le sera encore j'en ai bien peur) alors qu'avec une vraie estime de soi on n'a plus besoin de recevoir (ni de donner d'ailleurs) ce qui fait que quand il a lieu le don devient authentique. Du moins c'est ce que je pense.
    En fait j'irai encore plus loin et dirai que l'estime de soi et l'amour propre s'opposent et même davantage, ils s'excluent. L'amour propre croît au détriment de l'estime de soi - et inversement - et comme l'amour propre est insatiable, en pensant nourrir notre estime de soi mais poussés par notre amour propre nous ne faisons que tenter de rassasier ce dernier. En vain bien entendu. L'amour propre a besoin de gratifications permanentes.
    L'amour propre rend dépendant.
    L'estime de soi libère.
    Maintenant le tout est de savoir lequel des deux nous pousse à agir... Quelle est l'impulsion secrète de nos actes ? Et pire : de nos aspirations et de nos rêves ? Sauver le monde est-il toujours plus noble que le bête désir de s'enrichir ? Et écrire ? On écrit pour soi ou pour les autres ? Parce que ça nous nourrit en soi ou parce qu'on espère que le miroir des autres nous apportera quelque périssable manne ?

    Voilà... J'avais envie de proposer la réflexion qui a précédé au plus grand nombre mais je ne sais pas si c'est l'amour propre ou l'estime de soi qui m'a déterminé. ?Mort de rire?


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  • Ca faisait aussi belle lurette (Tiens si j'ai une fille un jour je l'appellerai Lurette : On dirait bien que "lurette" ne s'emploie qu'avec le qualificatif "belle" ; on n'a jamais vu une vilaine Lurette. Cependant il est inquiétant qu'on doive lui ajouter ce qualificatif... Pourquoi serait-il nécessaire s'il était évident que Lurette était belle. On ne dit jamais la belle Claudia Schiffer. On sait que Claudia Schiffer est belle. Inutile de s'embarrasser d'une telle redondance... Alors que Lurette ne se sépare jamais de son "belle", comme si elle avait peur qu'on puisse la penser laide. Inquiétant. Peut-être même qu'elle dévie notre attention de ses traits disgracieux par le biais de ce "belle" univoque. Et on continuerait notre route apaisés et rassurés sans la moindre conscience du grossier subterfuge qui nous a abusés !! Méfiance. Je ne suis finalement  pas surpris que ce prénom soit si peu répandu. L'humain a du flair et il y a belle lurette qu'il sait toutes les sournoises surprises qu'une Lurette peut lui réserver...) que je n'étais pas allé au théâtre.

    Inadmissible mais bon les contingences professionnelles et tout ça tout ça enfin vous voyez quoi ?! Hier, enfin, n'y tenant plus, j'ai sauté mon souper pour "mange ta soupe". En voyant le titre, la culpabilité qui m'a saisie a failli me renvoyer chez moi séance tenante une serviette autour du cou. Mais j'ai résisté à cette impulsion de réifier la fiction. Depuis le temps je sais faire la différence. (enfin je crois.)

    Donc "mange ta soupe" est une création : un tableau de pièces glanées ci et là et assemblées avec plus ou moins de cohérence. Il y a des interviews réalisées dans la rue, des anecdotes des acteurs, des textes de ceux-ci (principalement Marie-Eve), la voix enregistrée d'un nutritionniste, des extraits bibliques et autres, des chants et sans doute que j'en oublie. Moi j'ai passé un bon moment. C'était distrayant et amusant. On rit souvent. La scéno est décalée et l'espace bien géré. Les quatre acteurs, en costumes seconde peau ignobles, sont très bien : Frédéric Lugon, Marie-Eve Mathey-Doret, Lucienne Olgiati et Julien Opoix.

    Si je dois émettre une réserve ce serait par rapport au rythme. Comme il s'agit de morceaux ayant parfois comme seul fil rouge celui de l'estomac, les transitions sont un peu rudes. Et comme le jeu est distancé, on est difficilement pris aux tripes. (C'est dommage quand on cause bouffe.) En résumé j'ai passé un bon moment mais je n'ai pas été saisi ; j'ai embarqué pour une croisière. Ce qui est agréable aussi. Donc cette mise en scène d'Olivier Périat vaut le voyage.

    C'est à <?xml:namespace prefix = st1 ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:smarttags" /><st1:PersonName w:st="on" ProductID="la Grange">la Grange</st1:PersonName> de Dorigny à Lausanne encore jusqu'au 25 mars. (Réservations : 021/592 21 24)


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  • Ça faisait bon temps que n'avais plus pu me débloquer de soirée cinéma. Vitus, film suisse était la bonne occas pour renouer avec le principe. Rien de tel qu'un peu de patriotisme pour se rassurer dans les grands moments de solitude.

    L'histoire est plaisante. Ça verse parfois dans le sentimentalisme graisseux mais heureusement sans excès. Étant donné la thématique on aurait pu faire bien pire. Le scénario accroche tout du long et nous réserve son lot de revirements inattendus. C'est bien interprété dans son ensemble. J'ai eu parfois de la peine avec le Vitus pré pubère mais ai pu m'en accommoder sans trop de violence.

    Par contre ai eu plus de difficulté à m'identifier au personnage de Vitus, à le trouver sympathique, à percevoir sa détresse. Ai constaté qu'il était plus délicat de se reconnaître en une figure humaine déshumanisée plutôt qu'en une figure non humaine humanisée. Je m'explique. Il y a grand nombre de films mettant en scène des monstres (la belle et la bête, le silence des agneaux, ou même spiderman tiens...) et il est plus évident d'appréhender quelqu'un par ses imperfections, ses failles, que par son côté lisse. Vitus souffre d'un trop de perfection, immensément doué, profondément bon... et, comme le film le mentionne explicitement, c'est cet excès qui rend sa présence en ce monde "imparfait" rugueuse et difficile. (Jusqu'au moment où il l'utilise à son avantage.) C'est là que le bât blesse, pour moi ce gosse manque de ce relief, de cette épaisseur qui puisse rendre un personnage attachant. Il était trop d'une pièce. Je crois que nous sommes faits de nos contradictions, de cette dualité qui se mesure et s'oppose en permanence. Et finalement c'est ça qui nous rend humain.

    Peut-être que ça ne tenait que de la qualité de l'interprétation mais je ne pense pas. Il doit y avoir une conjugaison entre le jeu et l'écriture. C'est vrai qu'il y a des acteurs qui ouvrent des univers rien qu'en étant là et je pense que ceux-là peuvent se dégager de n'importe quelle écriture et sauver le pire des scénarios. On en a l'exemple dans ce même film avec Bruno Ganz. Il ouvre des mondes, il te file droit où ça touche seulement par la qualité de sa simplicité et de son humilité. Il nous donne qui il est. Et vrai : ça suffit. Moi, il ne me faut rien de plus.


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